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Les incubateurs, acteurs clés de l'écosystème des nouvelles technologies

19 janvier 2017.

Tout récemment, Facebook a annoncé une nouvelle un peu surprenante : l’entreprise prévoit lancer à Paris un incubateur de start-ups, le Startup Garage. Il s’agit de la première expérience du genre pour Facebook, qui aidera jusqu’à 15 entreprises en démarrage à parfaire leur projet dans le domaine du traitement de données.

Pourquoi Paris ? L’écosystème d’affaires et technologique y est certainement très dynamique, au point que Facebook y a déjà installé un de ces trois laboratoires sur l’intelligence artificielle (après la Silicon Valley et New York). Les plus cyniques considéreront également probablement les avantages fiscaux liés à la R&D offerts en France… Mais peu importe, l’investissement de « plusieurs millions d’euros » reste le même.

Facebook se joint ainsi au projet Station F, qui ouvrira ses portes en avril dans le 13e arrondissement de Paris et accueillera à terme près de 1000 start-ups. Selon la maire de Paris, Anne Hidalgo, « avec ces 60 incubateurs, 85 espaces de travail partagés et 35 laboratoires », la ville concurrence sérieusement depuis l’année dernière sa rivale Londres en matière d’argent investi dans les start-ups.

Incubateur ou accélérateur ?

Les deux termes sont souvent utilisés de manière interchangeable, mais ce n’est pas le cas. Un incubateur de start-up s’intéresse à des entreprises (pratiquement) naissantes, qui possèdent un projet prometteur. Il accompagne les jeunes pousses sur le moyen ou long terme (pendant 6 à 12 mois par exemple).

Les accélérateurs s’adressent plutôt à des entreprises au projet plus abouti, ayant toutefois besoin d’un coup de pouce pour le développement et la commercialisation. L’assistance est plus courte (3 mois ou moins) et plus ponctuelle.

Il existe toutefois des points communs entre les deux : la plupart du temps, les incubateurs et accélérateurs sont des structures à but non lucratif. Au stade de l’incubateur, les projets sont souvent chapeautés par des institutions académiques, gouvernementales ou de développement économique ; alors que le financement des accélérateurs vient habituellement plutôt du capital de risque [1].

Station F, Willmotte et Associés, Paris.

L’émergence des incubateurs

Même si on doit l’invention du concept à Joseph Mancuso, qui a créé en 1959 le premier incubateur d’entreprises à Batavia, New York, la pratique n’a commencé à prendre un certain essor qu’au milieu des années 2000, marquées par le succès exemplaire de Y Combinator à partir de 2005.

Depuis, le modèle n’a cessé de prendre de l’expansion ; un organisme américain comme la National Business Incubator Association (NBIA) compte maintenant plus de 2 100 membres dans 60 pays [2].

Le concept fonctionne parce que l’expérience ressemble à une « éducation immersive, » affirme Brad Feld, cofondateur de l’accélérateur mondial TechStars, où une « période d’attention intense et focalisée permet aux fondateurs d’une compagnie d’apprendre sur un rythme très rapide. Tous les fondateurs finissent par apprendre par expérience, mais il s’agit d’un processus hautement inefficace et lent. L’idée des accélérateurs, c’est justement d’accélérer ce processus, de restreindre cet apprentissage dans une période fixe [3]. »

Et la méthode semble effectivement porter fruit ; les entreprises ayant passé à travers le processus d’un incubateur/accélérateur sont en effet beaucoup plus susceptibles de réussir que les autres. Selon la NBIA, 87 % des entreprises ayant suivi le programme d’un incubateur sont toujours en opération après 5 ans, comparativement à 44 % des autres [4].

Trois de ces compagnies font même partie des « licornes », qui partagent leur rareté et leur caractère mythique avec les créatures de contes de fées. Airbnb, Dropbox et Stripe, aujourd’hui toutes des entreprises privées évaluées à plus d’un milliard de dollars, ont en effet comme point commun d’être toutes passées par cette « école ».

Centre d'entrepreneuriat Alphonse-Desjardins Shawinigan.

Et au Québec ?

Le Québec ne fait pas exception à cette récente vague d’incubateurs de start-ups et d’accélérateurs d’entreprises. On en compterait plusieurs dizaines au Québec. En plus de projets comme la Maison Notman ou Montréal Ville intelligente, on trouve de nombreux autres endroits disséminés un peu partout dans la province, par exemple : le Centre d’entrepreunariat de Shawinigan, le Centre Entreprendre au Cégep Garneau et Le Camp à Québec, l’Espace-inc à Sherbrooke, l’incubateur de la Société de Développement de Drummondville, etc.

Selon l’entrepreneure, blogueuse et conférencière Kim Auclair, les incubateurs « améliorent les chances de réussite d’une entreprise tout simplement parce qu’ils offrent les outils précis qui leur permettent de maximiser leurs chances. » Les nouveaux entrepreneurs y sont assez choyés, ayant « l’occasion non seulement de suivre un accompagnement performant, mais également d’agrandir leur réseau de contacts, de gagner en visibilité et d’accroître leur crédibilité, » explique Mme Auclair.

L’une des grandes forces de ces incubateurs résiderait dans la polyvalence de leur expertise. Pour Kim, le passage en incubateur permet aux entrepreneurs « d’avoir accès à des conseils provenant de spécialistes dans différents domaines, qu’ils n’auraient peut-être pas les moyens de s’offrir. »

Y a-t-il des désavantages à faire partie de ces projets, pour Mme Auclair ? « Puisque chaque endroit est différent, il est très important pour les entrepreneurs de bien se renseigner et de cibler ce qu’ils recherchent exactement. Les accélérateurs d’entreprise peuvent ne pas convenir à tout le monde. »

 

[1] Source devenirentrepreneur.com.
[2] Source nbia.or.
[3] Source brookings.edu. Traduction libre.
[4] Source businessnewsdaily.com.

Crédits photographiques : Station F, Willmotte & Associés, Paris. Centre d'entrepreneuriat Alphonse-Desjardins Shawinigan.