Pari tenu : Tesla livre la plus grosse batterie du monde
Et ce n’est pas tout ! Il vient en plus de livrer, tel que promis, la plus imposante batterie au lithium-ion au monde en moins de 100 jours.
Un pari initié sur Twitter
Ça peut sonner comme une blague, mais c’est bien vrai : cette histoire a débuté sur Twitter, en mars dernier. C’est Mike Cannon-Brookes, le cofondateur de l’entreprise logicielle australienne Atlassian, qui a mis Musk/Tesla au défi de construire un gigantesque accumulateur pour mettre un terme aux pannes électriques généralisées qui affectent régulièrement l’état d’Australie-Méridionale. Cannon-Brookes s’est même engagé à trouver l’argent si Tesla pouvait livrer en 100 jours, c’est-à-dire un peu plus de 3 mois.
Musk a pris 18 heures pour répondre, probablement le temps de consulter son cousin Lyndon Rive, cofondateur de SolarCity, entreprise devenue filiale de Tesla. Mais l’attente en valait la peine : le PDG a annoncé qu’il prenait le pari de livrer une batterie d’une capacité de 100 MW/h et qu’elle serait opérationnelle 100 jours après la signature du contrat — sinon, ce serait gratuit. Ledit contrat a finalement été signé fin septembre avec le gouvernement australien, pour un montant estimé de 50 millions de dollars US. En fin de compte, avec l’entrée en fonction de la batterie début décembre, Tesla n’aura eu besoin que de deux mois pour gagner son pari.
La batterie
Installée dans le parc éolien de Hornsdale, près de la ville de Jamestown, dans une région très isolée de l’Australie-Méridionale, la fameuse batterie Powerpack (ou plus exactement une combinaison de ces batteries) a une capacité de 100 MW/h, soit l’équivalent d’une petite centrale électrique au charbon. Chaque mégawatt permet d’alimenter jusqu’à 1 000 foyers.
Confiance légitime ou excès d’orgueil ?
Plusieurs ont vu une certaine arrogance frondeuse dans la certitude de Musk de réussir son pari. Mais il avait deux bonnes raisons d’être sûr de lui : d’abord, avec la récente ouverture de l’immense usine de batteries de Tesla au Nevada, baptisée la Gigafactory.
Deuxièmement, les batteries Tesla ont prouvé leur valeur l’année dernière, après qu’une usine alimentée au gaz en Californie ait été fermée à cause d’une fuite de méthane et qu’on ait demandé à Tesla de produire une énorme batterie de 80 KW/h en 90 jours. Cette initiative a grandement permis de consolider la stratégie de stockage d’urgence de l’État américain le plus peuplé.
Les batteries, une solution d’avenir
Après des pannes d’électricité généralisées et répétées en Australie-Méridionale, le Premier ministre Michael Turnbull a déclaré un “état d’urgence énergétique”, tandis que l’opérateur du marché de l’énergie australien a appelé à des actions immédiates afin de prévenir des pénuries d’électricité imminentes. Un important fournisseur de gaz a de plus prévenu qu’il pourrait ne pas être en mesure de répondre à la demande l’hiver prochain (c’est-à-dire pendant notre été). Des fabricants ont brandi des menaces de mises à pied et de fermetures d’usines si rien n’est fait pour mettre fin aux pénuries et à la flambée des prix de l’énergie.
Les Québécois, qui sont à l’abri dans leur “bulle hydroélectrique” (pour l’instant !), regardent avec étonnement un pays comme l’Australie, l’un des plus privilégiés du monde et membre du G7, qui s’est retrouvé si rapidement dans une situation aussi désastreuse après avoir connu une telle prospérité économique alimentée par la production de charbon tout au long du XXe siècle.
La même chose pourrait-elle se produire dans d’autres pays, en Europe ou plus près de chez nous, aux États-Unis ? Cela n’a rien d’impossible. Et le moment venu, les batteries Tesla et d’autres dispositifs de stockage, combinés à des sources d’énergie renouvelable, pourraient bien devenir rapidement vitaux pour ajuster les fluctuations de l’offre à la demande.
Lyndon Rive croit fermement que d’ici 10 ans, 100 % des bâtiments australiens équipés de panneaux solaires (il y en a plus de 1,6 million à l’heure actuelle) disposeront d’accumulateurs, devenant ainsi quasi-indépendant du réseau électrique. C’est pourquoi, sans surprise, il ne prône pas d’investissement majeur dans de nouvelles centrales ou de nouvelles infrastructures de transport d’énergie, une position qui va à l’encontre de nombreux fonctionnaires et entreprises australiens.
Lyndon explique : “Le pire serait de continuer à investir dans le réseau alors que les panneaux solaires et les moyens de stockage se déploient dans des millions de foyers. Ça n’a aucun sens de dupliquer l’infrastructure.”